La Genèse
En fait, si ma maman n’avait pas accouché, à Paris, le 17 octobre 1944, tout ce qui suit n’aurait jamais eu lieu. Je la remercie du tréfonds de l’âme.
Deux ans plus tard, en 1947, mon père, pourtant bien pauvre, se paie un AVC et je me retrouve orphelin. Recueilli par mon parrain, cheminot dans la Somme à Ailly-sur-Noye, je passe les premières années de mon existence au cul des vaches !
Vrai.
Ensuite ce sont mes grands-parents paternels, concierges rue du Mail où se situent les bureaux de l’Avant-Garde (journal rouge) qui me recueillent, et j’atterris à l’école primaire de la rue de la Jussienne, avec Sylvie Vartan. Elle n’en saura jamais rien car elle est à l’école des filles et moi du côté des garçons. Ainsi va la vie.
Dans le même temps, je vais jouer au jardin du Palais-Royal et je suis fourni en bonbons par Colette (Le Blé en Herbe), qui ne manque pas de m’embrasser chaque fois que je passe devant elle…
Vrai.
Encore quelques années et je regagne le domicile de ma maman, rue de la Bastille, ou m’attend Jean-Pierre, mon grand frère. Comme je suis encore en âge d’aller à l’école, c’est place des Vosges dans la maison de Victor Hugo que j’apprends les tables de multiplication et les premières récitations.
En sortant de l’école, je croise Paul Fort et son grand béret…
Vrai.
A n’en pas douter, ma vie de saltimbanque était tracée ! Quand on a pour parrain Victor Hugo, Paul Fort, Colette et Sylvie Vartan, on ne peut qu’aspirer à fouler les planches et tâter de l’écriture !
La chanson, les débuts, le cabaret
Et nous voilà en 1960.
J’ai 16 ans. Mon frère 20. Il est appelé sous les drapeaux et part en Algérie en me confiant sa guitare. A son retour, j’ai composé une vingtaine de chansons et je lui demande son avis. Comme il n’y connaît rien, nous décidons d’aller à Bobino voir Brassens, pour avoir l’opinion d’un professionnel. Gentil et patient, le poète m’écoute et m’encourage à continuer. Il me dirige même chez Philips vers son directeur artistique Claude Dejacques, mais trop timide, je me contente de savoir que Brassens a bien aimé mon travail.
Vrai.
En 1961, fort de cette opinion, nous décidons, mon frère et moi, de monter un numéro de duettistes comiques : Gouate et Mallat…
1962, nous jouons à l’Echelle de Jacob, à la Rôtisserie de l’Abbaye, et à la Méthode avec Coluche, Maurice Fanon, Pia Colombo et Bobby Lapointe que je retrouve quelques mois plus tard dans la tournée Brassens à Laval.
Vrai.
En 1963, je remporte le Grand Prix de l’Eurovision mais personne ne s’en aperçoit. C’est dommage.
Et c’est faux.
En 1964, je pars à mon tour sous les drapeaux où je m’ennuie profondément...!
En 1965, à mon retour de l’armée, je rencontre Claude Serra, le père du compositeur Eric Serra.
Claude a inventé un genre de chanson qu’il a baptisé « Chanson Flash ». Le jeu consiste à écrire une chanson qui dure le moins de temps possible. Les siennes font un peu moins d’une minute, mais elles sont encore trop longues à mon goût, et avec son accord, j’entreprends d’en composer de moins de dix secondes.
Vrai.
La mayonnaise prend et je me retrouve bientôt à chanter chaque soir en cabaret mes petites âneries. Quarante chansons en vingt-cinq minutes !
Je change aussi de nom sans arrêt… En fait, je me cherche. On me voit au Caveau de la Bolée, à l’Ecluse avec Barbara, à l’Ecole Buissonnière avec René-Louis Lafforgue, au Port du Salut avec Maurice Fanon, à l’Echelle de Jacob avec Jacques Debronckart, etc…
Un soir je m’appelle Alain Roux (c’est mon vrai nom), le lendemain Alain Dubar, le surlendemain P’tit Louis…
Bref, je fais tout pour rester inconnu. J’y parviens aisément !
Vrai.
Les cabarets ferment l’été et pour manger, je me fais engager, sur les conseils d’Alex Métayer, au Club Méditerranée. Pendant plusieurs années chaque été, je voyage en Sicile, en Grèce, en Corse, en Amérique latine, aux frais de Gilbert Trigano qui m’apprécie suffisamment pour m’offrir une guitare en 1966, après que la mienne soit allée embrasser le béton de la piste de danse.
Vrai.
En 1967 au Club, je rencontre Jean-Pierre Elkabbach du côté de Buenos Aires. Il me propose d’entrer à France Inter. Ne me sentant pas de taille, je décline l’invitation. Je le regrette bien aujourd’hui. Ça fait pas mal dans un CV de dire qu’on a bossé à France Inter... La même année, toujours au Club Med, je rencontre André Roussin de l’Académie Française qui me fait faire ma première télé en compagnie de Barbara et de Georges Chelon, sous la direction d'Aimée Mortimer.
Vrai.
En 1968, je me retrouve à apprendre à écrire des chansons aux Editions Barclay. Dans le bureau d’à côté, Michel Fugain et Michel Sardou s’appliquent eux aussi à composer des chansons.
J’y croise Maxime Le Forestier et sa soeur Catherine avec lesquels je sympathise, et c’est ainsi qu’au mois de mai, nous allons chanter avec Georges Moustaki dans les usines en grève. Notamment à la Snecma.
Vrai.
En 1968 encore, Alain Barrière (Ma Vie) produit mon premier disque et me trouve mon pseudonyme, qui est en fait inspiré du véritable patronyme de François Villon, poète français du 15ème siècle, auteur de la Ballade des Pendus.
Vrai.
En 1970, je rencontre Jean-Louis Foulquier (Les Francofolies de La Rochelle, France Inter...) au Tire-Bouchon (cabaret Montmartrois) et sur ses conseils avisés, je passe de comique tout-terrain à chansonnier, et de cette année jusqu’en 1987, j’ajoute à ma déjà longue panoplie de cabarets, quelques établissements plus prestigieux :
Le Don Camilo avec Pierre et Marc Jolivet,
La Villa d’Este avec Sacha Distel et Isabelle Aubret,
Le Caveau de la République avec Jean Amadou et José Garcimore,
Le Théâtre de Dix Heures avec Bernard Dimey,
et l’Olympia !
Je participe parallèlement à de nombreuses émissions de radio sur France Inter, Europe 1, RTL et de télévision, France 3, RMC, RTBF (Zygomaticorama…)
Vrai.
C’est aussi au début de cette période (70/72) que je deviens copain avec l’immense dessinateur humoriste Marcel Gotlib (La Rubrique-à-brac) et que j’écris pour son magazine, Fluide Glacial, des petites sottises, en participant pour le même journal aux romans-photos de mon quasi frangin, Bruno Léandri.
Les années télé
Et nous voilà en 1981.
François Mitterrand est élu. Je suis content, mais il ne me téléphone pas pour me remercier, pourtant j’ai voté pour lui ! Il est vrai que le soir des élections il avait sans doute autre chose à faire, et moi je n’étais pas facilement joignable, vu que je venais d’atterrir à Montréal où m’attendait Félix Leclerc pour une série de concerts.
Vrai.
1982. A mon retour du Québec, la maman d’Antoine de Caunes, Jacqueline Joubert, me voit chanter au Caveau de la République et me propose de co-animer en compagnie de Cabu, William Leymergie, Jacky et surtout Dorothée, une émission pour la jeunesse : Récré A2.
J’accepte avec plaisir. Dès lors, je compose chaque semaine une chanson nouvelle destinée à consoler les enfants de leurs petits malheurs.
La séquence s'intitule d’ailleurs « Les Petits Malheurs », et c’est William Leymergie qui lui a donné son nom.
Vrai.
Je participe chaque mercredi à ces émissions qui se font en direct, puis Mme Joubert me demande de passer sur les quotidiennes, et j’improvise sur la guitare que vient de me céder Marcel Dadi (La Guitare à Dadi), des petits couplets destinés à présenter les dessins animés.
Vrai.
En 1985, toujours avec mon répertoire de chansons flash, je présente l’Olympia.
Vrai.
En 1987, M. Jean-Luc Azoulay, auteur, compositeur et producteur de Dorothée, puis plus tard d’Hélène, des Musclés, etc..., me propose de suivre Dorothée pour co-animer sur TF1 une nouvelle émission jeunesse : Le Club Dorothée.
Pendant 9 années aux côtés de la star des enfants, je participe avec plaisir à toutes les émissions d’AB Productions. Notamment à « Pas de Pitié Pour les Croissants », la série la plus déjanté du paf (Paysage Audio Visuel Français) de l’époque ! En dix ans de TF1, les heures d’émission se comptent par milliers !
Vrai.
Je chante, je danse (mal), je joue la comédie, je gagne très bien ma vie, mais je m’emmerde. J’ai besoin de changer d’air, et je quitte l’équipe en 1996. Sans heurt, sans colère, seulement las de ce boulot. J’y reviens néanmoins à la demande de M. Azoulay pour participer aux dernières émissions du Club Dorothée qui s’achève en 1997.
Vrai.
Retour dans la vie vraie…
A partir de 1997 commence une longue période de galères. Je tente bien de tourner la page télévisuelle, mais rien n’est simple. Marqué par ces émissions destinées à la jeunesse, pendant de, sans doute, trop longues années, les portes refusent de s’ouvrir !
Ni les radios, ni les télés, ni le cinéma, ni le théâtre, ni les cabarets, ne désirent me donner une nouvelle chance ! Trop âgé pour qu’on me confie du boulot comme comptable dans une entreprise, je me retrouve rapidement sans aucun revenu ! Je vends ma maison de la région parisienne. Je m’acquitte de mes crédits et avec ce qu’il me reste de monnaie je fais l’acquisition d’une fermette dont le toit s’envole lors de la tempête de 99 !
Sans toit et sans revenu... l’avenir semble fortement compromis…
Quelques empressés traduisent ma situation par SDF. Erreur. J’ai bien un domicile, mais pas de toit… ce qui n’est pas la même chose. Je ne gagne pas ma vie, mais j’ai les Assedic. Je ne suis donc pas à la rue même si la situation est rude !
Décidé à relever le museau, j’emprunte à mon frère de quoi remonter sur scène et je cours proposer mon nouveau répertoire aux amateurs de chansons du Festival Off d’Avignon. On est en l’an 2001.
Preuve que je ne suis pas brouillé avec mes anciens collègues, Jean-Luc Azoulay m’offre les affiches, Dorothée me donne un micro, Ariane et Jacky se cotisent pour payer mon séjour avignonnais. Vrai.
Si le public est présent, les professionnels ont encore du mal à faire le déplacement, alors j’insiste et je refais Avignon les trois années suivantes.
Je compose dans le même temps trois albums de chansons d’humour et d’engagement : « Carnet mondain », « Toi, ma guitare et moi » et « Tout pour être heureux ».
Vrai
Petit à petit, le Corbier refait son nid. Avec le soutien de Sarcloret, de Serge Utgé-Royo, de Michel Bulher, et du poète Mathias Vincenot, on me voit à la Sorbonne, au Théâtre de Ménilmontant, au 20ème Théâtre, au Cinq Diamants et dès 2008, fidèlement accroché à mes guitares, je chante partout en France bien sûr, mais aussi en Belgique, en Suisse, au Canada et jusqu’au fin fond de la Russie à Irkoutsk.
Vrai.
J’ai fait un cinquième album en 2010 "Presque Parfait ". Un sixième «François Corbier en concert avec Eric Gombart » (http://youtu.be/UGz57FR8yus ) un public de 19 titres + un bonus enregistré lors de mon concert à Bercy en décembre 2010, est sortit en Octobre 2012. Le septième, un studio de 15 titres est en cours et verra le jour mi 2013. Mon livre, « Vous étiez dans Dorothée ? », est sortit début Novembre 2012. Et la tournée se poursuit, de festivals en festivals, de petits lieux en salles prestigieuses, c’est plus de 240 jours par an sur les routes que j’ai le plaisir de rencontrer de nouveaux visages et le bonheur de partager des idées.
Ni milliardaire, ni clochard, je poursuis ma route enchantée !
Pas de formation renseignée